En SASU, vous avez la main sur votre rémunération. Vous pouvez à la fois être salarié et percevoir des dividendes. Entre fiscalité allégée et protection sociale, comment optimiser ?
Suivez le guide pour tout savoir !
La SASU, Société par Actions Simplifiée Unipersonnelle est un statut dans lequel vous êtes actionnaire unique de l’entreprise. Vous devez désigner un Président pour représenter et gérer la société. Ce rôle peut être tenu par vous-même ou par une personne extérieure à l’entreprise, physique ou morale.
taxe En pratique, beaucoup d’indépendants assument à la fois le rôle d’associé unique et de Président.
Cette double casquette permet un choix entre les deux modes de rémunération, à savoir :
La grande différence, c’est le coût. Il peut y avoir le double de cotisations sociales entre un choix et l’autre.
Le choix n’est pas exclusif : il est fortement conseillé de réaliser un mix des deux pour trouver la répartition la plus efficace possible, à la fois fiscalement (financièrement) mais aussi pour obtenir une bonne protection sociale et bénéficier des avantages du statut de salarié.
Le bon choix dépendra de votre situation personnelle : il n’existe pas de solution unique.
L’arbitrage entre salaire et dividende est un choix spécifique aux SASU, car les autres statuts (AE, micro-entreprise, EURL) n'ont pas cette double possibilité de rémunération.
Plus précisément, c’est spécifique pour les SASU à l’IS (Impôt sur les Sociétés). En effet, dans les SASU à l’IR (Impôt sur le Revenu), la question ne se pose pas : l’intégralité du résultat est reportée dans la déclaration de revenus personnelle du président-associé.
Pour bien choisir, commençons par étudier le fonctionnement de chaque option.
C’est l’Associé Unique doit déterminer l’éventuelle rémunération du Président.
Le Président étant mandataire social, il n’est pas soumis au salaire minimum prévu par le code du travail. La rémunération du Président est totalement libre : il est même possible de déterminer que le Président exercera ses fonctions bénévolement.
Le choix doit être consigné :
La deuxième option est la plus souple, car elle permet de ne pas avoir à modifier les statuts à chaque changement de rémunération.
Le salaire doit être régulier et mensuel.
L’entreprise doit procéder à l’émission d’une fiche de paie (bulletin de salaire) et transmettre les informations aux organismes sociaux et aux impôts.
L’entreprise peut aussi verser des primes si les résultats sont bons. Elles sont alors totalement discrétionnaires et suivent le même régime fiscal et social que le salaire.
Le salaire et les primes sont des charges déductibles du résultat de l’entreprise. Par conséquent, plus une entreprise verse de salaires, plus elle réduit son résultat, et moins elle paye d’impôt sur les sociétés.
Rappellons que le barème de l’IS se compose de deux tranches pour les entreprises réalisant moins de 10 millions d’euros de CA :
Bénéfices compris entre… |
Taux d’imposition |
0 et 42 500 € |
15 % |
au-delà de 42 500 € |
25 % |
Le salaire est une sortie de trésorerie mensuelle et prévisible.
Côté entreprise, il faut bien tenir compte des cotisations sociales à régler : on considère généralement qu’il faut ajouter 80% au salaire net pour obtenir le coût total employeur.
Par exemple, si vous décidez de rémunérer votre Président 2000 € par mois, le coût pour l’entreprise sera de 3600 € environ. Le pourcentage augmente avec le montant du salaire.
Attention aux décalages de trésorerie : certaines cotisations sociales ne sont pas réglées tous les mois mais tous les trimestres.
Le salaire sera imposé au barème de l’impôt sur le revenu.
Rappelons que l’impôt est progressif (par tranches) et qu’il se calcule après un abattement de 10% pour frais professionnels.
Cependant, le plus coûteux ne sera pas forcément le salaire mais les cotisations sociales. En effet, pour verser 100 € de salaire, cela “coûtera” environ 180 € à l’entreprise.
C’est le principal inconvénient de la rémunération sous forme de salaire en SASU : l’écart entre “coût total employeur” et “net net salarié” est important.
Cependant, la déductibilité du salaire et des cotisations sociales (part employeur) atténuent légèrement la charge au niveau global.
Dès que le Président perçoit un salaire, il ressort du régime général de la sécurité sociale. Ses frais médicaux sont donc couverts comme un salarié. En tant que salarié, il peut profiter éventuellement d’avantages prévus par l’entreprise (mutuelle employeur).
En outre, les cotisations sociales ouvrent des droits à la retraite.
Enfin, les cotisations sociales intègrent aussi une assurance contre les accidents du travail, une contribution à la formation professionnelle pour financer les formations, etc.
Étudions maintenant le fonctionnement des dividendes !
Les dividendes dépendent du résultat de l’année précédente.
Il sont donc versés après la clôture des comptes, et décidés lors de l’assemblée générale en fonction du résultat distribuable.
Pour que le résultat soit distribuable, il faut :
Dans ces conditions, il est possible de verser un dividende, au maximum égal au résultat additionné des éventuels reports à nouveau des années précédentes.
La décision d’affectation doit être prise dans un délai de 6 mois à compter de la clôture de l’exercice comptable. Elle doit être rédigée dans un procès-verbal de décision de l’associé unique, consigné dans le registre des décisions.
Le virement peut être émis dès signature de la décision.
NB : au cours du premier exercice, il est donc impossible de verser de dividende : il faut attendre la première clôture.
Au niveau de l’entreprise, au moment du versement de dividende, vous devez remplir une déclaration fiscale spécifique : le formulaire 2777-SD intitulé « Revenus de capitaux mobiliers – Prélèvement et retenue à la source ». En effet, vous devez appliquer un prélèvement à la source et ne verser que le dividende net de ce prélèvement à l’actionnaire. Le montant prélevé doit être reversé au fisc dans les quinze premiers jours du mois qui suit le paiement des dividendes.
Ce prélèvement doit avoir lieu même si l’actionnaire décide de renoncer à la Flat Tax (nous l’évoquerons plus tard).
Uniquement si des réserves ont été constituées à cet effet. Sinon, c’est impossible.
Le dividende n’est pas une charge : c’est un mode d’affectation du résultat net.
Tout se passe après l'imposition de la société. Le dividende est donc totalement neutre sur la fiscalité de l’entreprise.
Les dividendes sont un virement de trésorerie des comptes de l’entreprise vers le compte de l’actionnaire.
Attention toutefois : l’existence d’un bénéfice distribuable ne se reflète pas forcément dans le trésorerie de l’entreprise !
Autrement dit, il est possible que vous votiez un dividende sur la base des comptes, mais que le montant ne soit pas présent sur le compte bancaire.
Comment est-ce possible ? Deux effets sont en jeu :
Par conséquent, au moment de la détermination du dividende, le dirigeant de SASU doit être attentif à ce qu’il est légalement possible de distribuer, mais aussi à ce qu’il est opportun de faire financièrement afin de ne pas mettre en péril la liquidité de son entreprise.
Il serait dommage de devoir s’endetter pour payer son dividende !
Pour le dividende, vous avez le choix.
L’imposition des dividendes se décompose en deux parties :
Pour 10 000 € de dividendes :
Avec la Flat Tax
Dans le premier cas (Flat Tax) après avoir payé 30%, il vous reste 7 000 € net.
En renonçant à la Flat Tax
Dans le deuxième cas (l’intégration dans les revenus), le calcul sera le suivant .
Il faut commencer par régler les prélèvements sociaux : 1 720 €.
Il faut ensuite intégrer 60% des dividendes au barème de l’IR, soit 6 000 €.
Pour être exact, il faut tenir compte de la CSG déductible : 680 €. Elle s’appliquera l’an prochain. Pour simplifier le calcul, on peut considérer que ces 680 € déductibles s’appliquent immédiatement. La part soumise à l’impôt sur le revenu n’est alors que de 5 320 €.
Pour un célibataire avec une seule part, les tranches d’impôt sur le revenu sont les suivantes :
Barème de l’impôt 2024 sur les revenus 2023
Fraction du revenu imposable |
Taux à appliquer sur la tranche |
de 0 à 11 294 € |
0% |
de 11 295 € à 28 797 € |
11% |
de 28 798 € à 82 341 € |
30% |
de 82 342 € à 177 106 € |
41% |
supérieur à 177 106 € |
45% |
Tout dépendra donc de la tranche marginale à laquelle seront imposés les dividendes. Cette tranche dépend des revenus déjà présents dans votre foyer et donc… de vos salaires !
Au final, le cumul impôt + prélèvements sociaux s’élève à :
Pour mémoire, l’imposition avec la Flat Tax était de 3 000 € tout compris.
L’intégration dans les revenus n’est avantageuse que jusqu’à la tranche à 11%, ou si le dividende est à cheval entre la tranche à 11% et la tranche à 30%, mais pas si l’intégralité des dividendes est dans la tranche marginale à 30%.
Si les dividendes sont votre seul revenu, il faut raisonner autrement car vous n’avez pas de salaire. Vous remplirez d’abord la tranche à 0%, puis celle à 11%, puis celle à 30%, etc.
En pratique, beaucoup d’entrepreneurs privilégient la Flat Tax.
Le plus simple est de réaliser deux simulations sur le simulateur du fisc.
Vous pourrez également le faire au moment de votre déclaration : cocher la case 2OP vous permettra d’activer ou de désactiver la Flat Tax. À voir comment cela fait évoluer votre impôt et choisir ce qui sera le plus avantageux…
Pas de panique : le site des impôts vous suggérera spontanément de cocher ou décocher cette case s’il estime qu’un choix est meilleur pour vous.
Le choix doit se faire au moment de la déclaration, donc pas d’urgence.
Revenons sur le sujet principal de cet article : Dividende ou Salaire !
En un mot : rien !
Qu’il s’agisse de Flat tax ou d’intégration aux revenus, c’est la même chose : les 17,2% de prélèvements sociaux sur dividendes n’ouvrent aucun droit. Ni à la sécurité sociale, ni à la retraite.
Pour obtenir une protection sociale même minime, il faut alors entrer dans le dispositif de la CSM (Contribution Subsidiaire Maladie), aussi appelé Taxe PUMa.
Vous l’aurez compris, l’idéal pour la protection sociale est de percevoir un salaire !
Maintenant que nous avons détaillé le fonctionnement du salaire et du dividende, il est temps de trancher.
Il faut généralement mixer les deux.
En effet, l’essentiel de la protection sociale est acquise y compris avec un salaire relativement faible.
En outre, les cotisations sociales sont soumises à des planchers mais une progressivité avec des taux plus importants pour les revenus importants. Par conséquent, au-delà d’un certain seuil, le retour sur investissement des cotisations est décroissant avec le montant cotisé.
Une bonne formule nous semble être la suivante :
La prime et le dividende seront placés à titre personnel. Pour compléter votre retraite (puisque les dividendes n’ouvrent pas de droits), allez lire notre comparatif des placements retraite pour freelance.
Il serait tentant de comparer :
pour conclure que 100 € versés deviennent 35€ dans un cas et 70 € dans l’autre.
Toutefois, ce raisonnement oublie que :
Au final, le différentiel est plus faible que ce que l’on pourrait imaginer à première vue.
Et il faut aussi tenir compte des avantages sociaux amenés par les cotisations sociales, notamment pour la retraite.
Nous avons détaillé dans un autre article le fonctionnement de la retraite pour les indépendants. Ce qu’il faut retenir, c’est que
Il suffit d’un salaire d’environ 500 € par mois permet de valider 4 trimestres par an.
Côté montants, le montant de votre retraite de base sera calculé sur vos 25 meilleures années de cotisation. Il est donc “inutile” à cet égard de cotiser davantage si vous considérez que l’année ne sera pas une des 25 meilleures. Cependant, votre retraite complémentaire peut dépendre de vos montants totaux de cotisation grâce au cumul des points.
Lors de vos optimisations, vous allez devoir composer avec les éléments suivants :
A titre personnel, être indépendant demande aussi de bien gérer sa trésorerie.
L’impôt sur le revenu est progressif.
La première erreur commune est de s’imaginer que sauter une tranche requalifie l’intégralité des revenus dans la nouvelle tranche.
La seconde erreur, plus subtile, consiste à raisonner “statique” plutôt que “dynamique”.
Ainsi, avec des revenus salariés de 28 000 €, vous êtes encore dans la tranche marginale à 11%.
Cependant, dans vos simulations, vous devez tenir compte que vous êtes très proche du plafond de la tranche. Vos revenus additionnels (une prime de 15 000 € par exemple) seront essentiellement dans la tranche à 30%, pas celle à 11%.
Si vous souhaitez emprunter pour acheter un bien immobilier, ou présenter un dossier de location à une agence, un salaire sera toujours plus rassurant pour votre interlocuteur.
Certes, les dividendes seront probablement pris en compte avec un peu de négociation de votre part, mais ils seront toujours perçus comme moins réguliers et qu’un salaire (même si c’est vous qui pilotez la répartition).
L’ACRE (Aide à la Création ou à la Reprise d’Entreprise) permet une exonération totale ou partielle de cotisations sociales pendant 12 mois, sous conditions.
Puisque vous ne payez pas de cotisations sociales, percevoir votre rémunération sous forme de salaire peut devenir plus avantageux que le dividende.
À voir : Les critères de l’ACRE sur le site du service public, choisissez bien l’onglet “Autres situations”.
Le choix n’est pas uniquement entre salaire et dividendes.
Une fois votre salaire payé, vous pouvez décider de ne verser qu’une partie du résultat en dividendes.
C’est le choix fait par la majorité des entreprises. Les réserves servent à :
En conservant de la trésorerie dans l’entreprise, vous pérennisez et développez votre activité. Et elle n’est pas bloquée pour autant, vous pourrez toujours la récupérer ultérieurement si elle n’est pas investie dans du matériel ou des immobilisations.
Si vous débutez, ou si vous convertissez votre micro-entreprise dans un autre statut, ne vous focalisez pas uniquement sur la SASU.
L’EURL peut représenter une bonne alternative. Le régime social est celui des TNS (Travailleurs Non Salariés). Ce régime est moins coûteux mais moins protecteur : vous devez organiser vous-même une part de votre protection sociale.
En EURL, vous avez aussi le choix entre IS et IR, ce qui permet de s’adapter finement à votre situation.
L’arbitrage entre salaire et dividende fait partie des nombreuses optimisations que nous pouvons vous conseiller !